Soi et/ou autrui

La dernière fois nous avons traité le sujet du « soi » dans la psychologie. Et comme j’ai eu beaucoup des messages, nous allons ici voir la place de « soi » dans la philosophie.

« Le triomphe de l’art est de conduire à autre chose que soi. »

Œuvres complètes (édition 1994) – Simone Weil

 

Le mot « soi » a été traité dans la psychologie et dans la philosophie, et ce mot nous envoie aussi à autrui. Comme c’est un vaste sujet, je vous propose qu’on réfléchisse ensemble la question de « qu’est-ce qu’autrui ? »

La rencontre avec l’autre et la relation qui en découle constituent un questionnement dans la philosophie existentielle pour penser l’autre à partir de moi, à l’origine de réflexions dont voici quelques exemples et citations.

« Je ne saisis jamais autrui comme corps sans saisir en même temps de façon non explicite, mon corps comme le centre de référence indiqué par autrui »

Jean Paul SARTRE

-Sartre nous renvoie à autrui dans son ouvrage « L’Être et le Néant » avec une phrase : « j’ai besoin d’autrui pour saisir à plein toutes les structures de mon être… ». Dans ce livre, le philosophe nous explique que, par le regard de l’autre, je me découvre, je me révèle à moi-même. Pour Sartre le regard d’autrui ne nous prive pas de liberté, il nous définit, nous circonscrit, mais on a toujours une manœuvre de liberté. Le regard d’autrui est à la fois un instrument de révélation de soi par autrui et de circonscription, ce qui peut relever parfois de l’assignation.

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– “L’autre n’est pas une simple duplication du moi parce qu’il ne coïncide jamais avec moi, parce qu’il est là-bas alors que je suis ici”

HUSSERL

– Selon Husserl qui a traité le sujet de la coexistence des intentionnalités, toute conscience est conscience de quelque chose, est intentionnelle : il n’y a pas de conscience pure, indépendante de ce dont elle est conscience. La conscience n’est donc pas un être (le moi), mais un acte de cet être par lequel il se rapporte au monde.

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« Tous nos actes, toute notre vie dépendent totalement et entièrement

des images changeantes que l’autre se fait de nous »

Max SCHELER

– Scheler, qui a fondé sa morale sur la sympathie, défend l’idée que nous pouvons comprendre la douleur d’autrui uniquement par sympathie sans y participer.

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« « Les autres », cela ne veut pas dire : tout le reste des hommes en dehors de moi, dont le Moi se dissocierait – les autres sont bien plutôt ceux dont le plus souvent l’on ne se distingue pas soi-même, parmi lesquels l’on est soi-même aussi »

Heidegger

-Pour Heidegger, l’être est autocentré. Il s’interroge ce que c’est le « soi » ou « soi-même ». Est-ce que dans « connaissance de soi » c’est « soi » qui vient d’abord ? Ce philosophe est intrigué par l’identité et la recherche de signification « être soi ». Il remet en question la distinction claire et nette entre les autres et le soi en disant qu’il y a une porosité entre ces deux entités : le soi est nourri d’autres, tout comme l’autre (et le regard qu’on leur porte) est nourri de soi.

Pour aller plus loin, je regarde : Prendre Conscience de Soi, de Descartes à Heidegger « Philosophie et Réflexion éthique pour tous (environ 2 minutes 😉

 “La relation à autrui est asymétrique : je ne dois pas attendre de réciprocité”

Levinas

– Dans le livre « totalité et infini » Levinas se démarquera en décrivant l’expérience de l’altérité et en soulignant les limites de la connaissance. Par le visage, je ne fais pas donc pas l’expérience d’autrui comme objet de plaisir ou de connaissance, mais l’expérience de l’altérité. Le visage d’autrui n’est pas un obstacle ou une résistance, mais une conscience et un regard qui nous met en cause ou en doute sur le pouvoir que nous pouvons avoir sur le monde.

Si vous souhaitez voir un film sur la question de l’autre et la relation avec soi 😉 (Levinas et l’autre, la durée est de 5 minutes)

« Je m’accomplis au contact du Tu, je deviens Je en disant tu. Toute vie véritable est rencontre »

Martin BUBER

 

– Buber distingue le mode relationnel du mode expérimental, le premier est forgé dans la réciprocité et les apports mutuels tandis que le second est simplement la prise d’un objet par un sujet, c’est à dire la relation entre une chose passive et un soi actif.

Dans son livre « je tu » ce philosophe humaniste nous fait réfléchir sur la dualité de ce monde et sur notre relation de l’homme face à deux situations :

 

1° je/tu (une vraie rencontre, relation)

Et

2° je/cela (rapport instrumental au monde)

 

Pour mieux comprendre cette philosophie humaniste, je vous propose de regarder (la durée est de 2 minutes) :

Ces philosophes me font réfléchir par rapport à « soi » et « autrui ».

Si l’autre est co-créateur du soi, qu’en est-il de nos qualités propres ? Comment les définir ? Comment les clarifier ? Jusqu’où ces questionnements doivent-ils interroger à nouveau autrui, et jusqu’où doit-on tenter de puiser en soi, malgré les limites que l’on connaît à ce terme.

Dans mes accompagnements, je traite souvent avec mes coachés du sujet de l’estime de soi.
Ci-dessous un regard différent sur ce sujet, un échange entre un philosophe et un psychologue que vous connaissez certainement : Ilios Kotsou. (La durée est de 10 minutes environ)

A bientôt 🔜

Comments

  • 19 mars 2021
    Partouche

    Très beaux textes de levinas et buber
    Très intéressant
    Min 2 ieme prénom en hébreu est lyat «  je suis Toi « 
    .. curieux
    ..
    merci bcp Sima

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    • 20 mars 2021

      Merci beaucoup pour tes commentaires 🙏très contente de lire que cet article t’a plu. « Iyat » c’est magnifique❤.J’ai préparé cet article avec beaucoup d’intérêt, j’aime particulièrement la philosophie de Buber

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